Pierre de Kériolet le pénitent breton

Conférence du Père André GUILLEVIC, à Josselin, le 17 mars 2024 - Pierre de Keriolet

(Transcription de la conférence, le plus fidèlement possible, depuis le logiciel Amberscript)

Comment parler de ce phénomène ? Parce que c'était un phénomène ce Kériolet, qui s'appelait exactement Pierre Le Gouvello de Keriolet, et il était né en 1602, sous la règne d'Henri IV, onze ans après, Yvon Nicolazic. Nous sommes au début du 17è siècle. Vous êtes allés à Sainte-Anne d'Auray certainement. Si vous regardez la basilique, le fronton de la basilique, vous avez deux statues à même hauteur, et d'égale hauteur aussi : Yvon Nicolazic côté sud et Pierre de Kériolet côté nord.

Ceux qui ont construit la basilique ont mis les représentations de ces deux personnages, à la même hauteur. Ça veut dire quelque chose. Ça veut dire que les deux personnes avaient marqué l'histoire de ce village de Keranna. (On dit Kériolet, pour résumer, c’est moins long).

Il était né à Auray le 14 juillet 1602, 14 juillet qui n'était strictement rien à l'époque puisque nous sommes dans l'Ancien Régime. Il était le quatrième venant après trois sœurs. Ses parents vont quitter Auray lorsqu'il aura cinq ans. Ils vont aller habiter un château dans un beau manoir dans la campagne de Pluvigner.

Il avait trois oncles au parlement de Bretagne, ce qui va bien l'arranger il aura ensuite deux beaux-frères aussi au parlement de Bretagne, avec cinq personnes de la famille au parlement de Bretagne. C'est une aubaine pour lui. Le garçon va être, dès tout petit, violent, rebelle, vicieux, indomptable. Ses parents vont avoir des difficultés à l'éduquer. D'abord ils ne pourront pas l'éduquer, il était rebelle à tout et à tous, et il va demander lui-même d'aller en pension. Ses parents vont l'inscrire à Rennes, au collège Saint Thomas, qui était tenu par les jésuites et les jésuites, c'était encore à l'époque une toute jeune congrégation. Il va faire un peu d'études mais il sera plus à l'extérieur du collège que dedans, parce que les pensions, à l'époque c'était assez lâche. Il se fait beaucoup de copains, évidemment, et il revient bien sûr à Kerlois pour les vacances. Mais ce qui l'intéressait c'était de s'amuser et surtout pas d'écouter ses parents, qui voulaient faire de lui un bon petit chrétien. Quand il grandit, il a un peu plus de 20 ans, il va vouloir se faire mahométan, n'importe quoi ! Mais pour embêter ses parents, il ferait tout. Il va aller à Vienne, ils vont partir à trois et ses deux camarades vont être tués. Lui non, il voulait aller voir, à Vienne, l'envoyé du grand turc, l'envoyé du sultan de Constantinople.

Petit à petit, toutes ses craintes, toutes ses peurs vont être chassées de son esprit. Et il ne va craindre rien et personne. Il est possédé par la fureur du duel, la grande joie de sa vie, cette passion du duel qu'il y avait eue ! Il y a eu deux interdictions duel, la première fut prise par Henri IV et et la deuxième par Louis XIII, qui devient roi de France en 1614. Après l'assassinat d'Henri IV en 1610, Louis XIII monte sur le trône en 1614 et entre les deux, il y a quatre ans où la France va être dirigée par Marie de Médicis.

Il écrit, je vais vous dire les sources, ces sources principales. Vous avez peut être lu ce livre qui est Pierre le pénitent Breton, Pierre de Kériolet, qui est écrit par Hippolyte de Gouvello, qui est un descendant de la famille. Mais c'est Hippolyte le Gouvello de la Porte, et non pas de Kériolet. Mais la source principale, c'est ceci, écrit au 17è siècle du temps de Kériolet, par le père Dominique de Sainte Catherine, qui était l'un des carmes appelés par monseigneur de Rosmadec et qui va écrire tout ce que Kériolet va lui dire, puisqu'une fois converti, il ira le voir toutes les semaines. Kériolet écrit à-propos du duel :” je faisais des querelles, j'attaquais l'un, j'attaquais l'autre je me battis une fois contre quatorze hommes que je fis fuir et ne perdis que le cordon de mon chapeau.”

Il avait la rage. Il veut faire soldat. Ça ne va pas durer très longtemps. Lui, dans l'armée ? non, ça n'ira pas du tout. Un jour, il est à Paris. Oui, il faut que je dise [que je n'oublie pas, quand même] s'il peut aller à Paris, s'il peut voyager, c'est qu'il avait de l'argent et il avait volé son père. Parce que pour bien vivre et voyager, il faut de l'argent et pour avoir de l'argent il y a deux solutions : soit on travaille et soit on vole. Il avait préféré la deuxième solution. Il avait volé l'argent de son père …top voilà et on y va. Et quand il est à Paris, il apprend une grande nouvelle qui va le réjouir au maximum : c'est la mort de son père. Il revient à Kerlois, il va tout faire pour déshériter ses sœurs, en les menaçant cette fois là de se faire protestant. “Non, non, non, non, non, non, reste tranquille, t'as déjà voulu être mahometant ! Écoute, on te donnera ce que tu voudras, mais reste catholique quand même”, lui disent ses soeurs.

Si bien qu'il va hériter de toute la fortune de sa famille, le château et toutes les terres qui sont autour, des métairies qui vont lui donner de l'argent. Il est à la tête d'une grande fortune, il va acheter un bateau, il va faire le commerce du blé. Lorsqu'on regarde sa généalogie, il avait des ancêtres pirates, ce qui peut peut-être expliquer quelque chose.

Mais lui, toujours plus loin ! il était toujours insatisfait, il n'avait pas perdu l'idée de se faire mahométant, il va se mettre au service de l'empereur d'Autriche qui a déclaré la guerre au sultan de Constantinople. Ça ne va pas durer non plus.

Le père Dominique écrit : “dans les premières années, ce n'était que libertinage, dissolution, crime, impiété, en un mot, une vie scandaleuse. On peut ajouter débauche, bonne chair, belles filles, querelles, sacrilèges. Telle était sa vie. Il a fait le rêve, qui s'est réalisé, de devenir conseiller au parlement de Bretagne. Ça a été un scandale dans la région d’Auray. Keriolet connu pour tout ce qu'il faisait, devenir conseiller, lui, qui allait juger les autres ! Ça, ça n'a pas passé ! Mais il y a un petit examen. Mais il a surtout acheté sa charge. Il est devenu conseiller au parlement de Bretagne le 5 octobre 1628 et quand il plaidait, il faisait tout pour envenimer les choses, pour qu'on vienne le provoquer, pour se battre en duel.

Conseiller au parlement de Bretagne, sa famille, évidemment, rêvait qu'il puisse se marier. Il avait une devise, c'était de “cajoler les plus belles et de tromper les plus sottes”. Il payait les domestiques des familles pour pouvoir se cacher dans les chambres. Il dit : j'étais adonné à toute sorte de lubricité pour satisfaire une autre fois à mes brutalités. Je me déguisais en charbonnier pour aller visiter une dame de condition, etc, etc. Il veut un jour monter dans la chambre d'une de ses conquêtes, ne sachant pas que son mari était là, et lui tire dessus. Il a échappé. Retenez, ,ses compagnons sont morts en allant à Vienne, pas lui. On lui tire dessus, il n'a rien. Une autre fois, la foudre tombe dans sa chambre, il n'a rien. Une autre fois, quand il est à cheval dans l'allée de son château, un arbre tombe, son cheval a mal, mais pas lui, pas lui.

Au milieu de tout ça, il fréquentait les églises. Pourquoi ? Pour se moquer, pour se moquer. Le prêtre était là-bas au fond, dos à l'assemblée lui, il venait là, au premier rang, évidemment, toujours pour se faire remarquer. Il ne pouvait pas rester au fond. Lui, il venait là, il singeait le prêtre, il se moquait de tout le monde, etc, etc, il ricanait. Il se moquait aussi des pèlerins qui passaient devant son château, parce que son château est à quelques centaines de mètres de la route qui va de Pluvigner à Keranna à Sainte-Anne, il les voyait passer sur la route. On le craignait. Oui, on le craignait, il faisait peur à tout le monde.

Est-ce que tout était mauvais chez-lui ? Non ! Il avait quand même une parcelle de bonté. Il faisait toujours l'aumône ( il pouvait !)  et dit le père Dominique, “sa compassion pour les pauvres était grande, il ne refusait jamais l'aumône, mais il refusait qu'on le remercie en lui disant qu'on prierait pour lui ou qu'on appellerait sur lui la bénédiction de Dieu.” Ça, il ne supportait pas. Ça le mettait en furie. Je faisais souvent l'aumône aux pauvres et j'avais de la compassion pour leur misère, mais non point pour l'amour de Dieu ni de la sainte Vierge, car je ne voulais pas en entendre parler. De tels discours me faisaient horreur. Et lorsqu'un pauvre me disait : je prie Dieu qu'il vous le rendre, ou bien je dirais un Ave Maria ou mon chapelet pour vous, je lui disais qu'il ne me parla point de cela et que je n'avais que faire de ces Ave Maria. Il se moquait de tout, de tout le monde.

Et pourtant, et pourtant, et pourtant …Le bruit a couru, il a couru et, à la fin de sa vie, on pourra dire que c'était vrai qu'il disait "je vous salue Marie tous les jours" !

  • Pour qui ? Pourquoi ?
  • Parce que sa mère lui avait peut être demandé de le faire ? Par superstition ?

Qui sait, peu importe. Aucun signe. Et il y en a eu des signes où il aurait pu mourir combien de fois ! Aucun signe ne semblait le toucher, le faire réfléchir, le faire changer d'avis. Rien ! Et pourtant, une nuit, dit-il, il a eu une vision de l'enfer. Il est troublé quand même, il va fréquenter les églises et il est même parti à la Chartreuse à Auray pour se faire chartreux. Enfin de compte, ça a duré cinq jours et quand il est sorti, il dit : cette vision que j'avais eue au monastère où j’étais, , ne me semblait qu'une imagination et qu'un songe de vieille, j'avais été bien méchant auparavant. Mais j'étais athée, je ne croyais ni paradis ni enfer et je ne me souciais de quoi que ce soit. Un petit aperçu de la première partie de sa vie. On peut en mettre beaucoup d'autres nous sommes en 1635, il a 33 ans. Nous sommes à un tournant de sa vie.

Maintenant, pendant quelques minutes, on fait des kilomètres et on va à Loudun. Est-ce que la ville de Loudun vous dit quelque chose ? Oui, c'est aujourd'hui dans le département de la Vienne. D'accord, c'était à l'époque dans le diocèse de Poitiers. Aujourd'hui peut être encore non, je sais plus. Non, oui, c'est encore ça. Un peu d'histoire.

En 1598, quatre ans avant sa naissance, il y a eu un événement important dans l'histoire de France. C'est l'Edit de Nantes, qui mettait officiellement fin aux guerres de religion et qui donnait à tous, particulièrement aux protestants qu'on disait les huguenots, disait-on, la liberté du culte, avec le droit de travailler dans l'administration mais ils n'avaient pas le droit avant. Et aussi, cela leur a donné des places fortes. La première des places fortes donnée aux huguenots était La Rochelle, et ensuite Loudun.

Il arrive de Loudun des bruits bizarres … On dit qu'il ya là-bas un couvent de religieuses possédées avec des prêtres, des jésuites, particulièrement père Surin dont on reparlera tout à l'heure, qui fait des exorcismes. Alors là, pour Kériolet c’est génial ! Des bonnes sœurs possédées, le diable, des exorcismes !!!

Évidemment qu’il va courir là-bas, il va courir là-bas …” ça va mal : j’y vais !”

On vient à Loudun de tous les coins de la France et même de l'Europe et de la cour de Louis XIII. On va venir aussi voir ce qui se passe.

Je cite : “j'avoue qu'il y a là à Loudun le mystère. Je n'ai pas d'explication rationnelle à vous donner. Je ne fais que citer. On parlait aux sœurs, ou aussi aux femmes, aux jeunes filles qui travaillaient aussi, qui venaient aider, etc, on leur parlait en Latin, en grec, en hébreu, en turc. Elles comprenaient tout et répondaient à tout, si bien qu'un savant, un jour, s'écria il faudrait être fou ou athé pour nier la possession. Et lorsqu'on demande aux religieuses mais vous a possédé, elle répond un sorcier qui s'appelle Urbain Grandier et Urbain Grandier, c'était le curé catholique de Loudun. Il était le curé de la paroisse Saint-Pierre du vieux marché et qui allait célébrer la messe, entre autres à l'église Sainte Croix.

Je suis allé à Loudun plusieurs fois. Aujourd'hui, l'église sainte croix a été transformée en musée.  Urbain Grandier était un homme très instruit, intelligent, bon prédicateur, plein d'esprit mais c'était un homme pervers et ambitieux. Il était l'auteur d'un petit livre qu'il avait intitulé "Traité contre le célibat des prêtres”.

Il faut le faire pour un prêtre !  Il était accusé d'impiété, de sacrilège, d'adultère.

Loudun était partagé en deux : 50 - 50. 50 % catholiques, 50 % de protestants. Urbain Grandier va mettre enceinte la fille du gouverneur protestant de Loudun. Vous imaginez un peu la situation.

Je continue, vous êtes bien assis pour écouter tout ça. Oui ?

Il avait été interdit de ministère par son évêque, l'évêque de Poitiers. Monseigneur de la Roche-Posay en 1630 pour crime contre les mœurs, impiété et profanation. Tenez vous bien, il a été réhabilité par l'archevêque de Bordeaux, Mgr de Sourdes ! Et quelle influence a eu Urbain Grandier pour que ses sœurs soient possédées ? C'est le grand mystère ! Si un jour vous trouvez la solution, je serais heureux que vous veniez me la donner. Toujours est il que les faits sont là : sont venus à Loudun, je cite : “l'évêque de Poitiers, l'archevêque de Tours, l'archevêque de Toulouse, l'évêque de Nîmes, des prêtres, des docteurs de la Sorbonne, des jésuites, des carmes, des capucins, des dominicains, etc, etc, etc, des médecins, des exorcistes.”

Mais Urbain Grandier a pris la tête des Huguenots contre Richelieu faut le faire ! Ça, évidemment, ça ne va pas plaire au cardinal. Non, Richelieu va envoyer à Loudun un émissaire qui s'appelle Jean Martin de Laubardement, et il va lui dire : “va voir ce qui se passe là-bas”. Il va venir à Loudun, il va d'abord rester un moment sans rien dire, il va regarder, il va écouter, il va séparer les religieuses pour les interroger, etc, il va faire une confrontation avec Urbain Grandier. Et au bout de tout ça, (vous êtes toujours bien assis) Urbain Grandier a été brûlé vif devant son église. C'est le 18 août 1634, écrit l'aumônier de l'Hôpital de Poitiers, devant une foule de six mille personnes et Urbain Grandier, avant de mourir, n'a donné aucun signe de repentir.

Et qu'est-ce qu'il fait ? Richelieu, il a fait abattre la forteresse de Loudun, il a fait abattre les remparts de Loudun. Et qu'est-ce qu'il a fait faire avec les pierres ? Il a fait construire, 30 kilomètres plus loin, une ville qui s'appelle Richelieu. Oui, l'origine de la ville de Richelieu, c'est en fait les possessions de Loudun. Alors, notre Kériolet, va arriver là-dedans, dans ce contexte, ô combien difficile il va arriver là ! Ils vont être deux, un copain avec lui. Il dit qu'en arrivant, il va se promener dans la ville le soir, et puis il va arriver à l'église Sainte Croix. L'une des religieuses s'adresse à lui :

  • Vous, qui êtes vous,

Je suis venu pour faire du commerce.

  • Monsieur, vous qui êtes un homme de cœur et généreux, que faites vous parmi ces femmelettes?

Je suis un homme de justice.

  • Il faut être un homme de cœur pour rendre bonne justice. Je te connais bien,

Ce fut tout, dit il pour le premier soir. Il va revenir quatre jours de suite et il avoue là, vraiment, qu'il est impressionné.

Il revient le cinquième jour, l'exorciste tient le saint sacrement et Kériolet raconte lui même, et là, il cite dit il, le démon qui parle :,

  • Il ne te faut point d'autres armes, lui dit le démon, prend celle là”, continue t il en montrant le saint sacrement, et quitte les tiennes”.

Ce fut, dit il, que je commençais à rentrer un peu en moi. Même quand je suis arrivé au logis, mon hôte s'aperçut de quelques changements en moi.

Il est retourné le lendemain. L'exorciste demande à nouveau au démon habillé en religieuse, (vous analysez comme vous voulez) pourquoi il était là.

  • Que sais tu repris le diable? (je cite le père Dominique),
  • que sais tu ? (dit il en se tournant vers moi, en me montrant du doigt) si ce n'est pas pour la conversion de cet homme là ?

Et Il demande à l'un des possédés, (l'exorciste demande à l'une des possédées pourquoi Kériolet a échappé à la foudre, (en breton. Arc buzan) !

Et réponse :

  • sans la Vierge Marie et ton ange gardien, je t'aurais emporté.

Et pour la chartreuse,

  • Dieu n'avait point voulu voir souffrir un homme aussi impur dans sa sainte maison.

Et Kériolet continue, c'est que je commençais à avoir peur. Le père exorciste me regardait. Je lui dis: “mon père, il a touché au but. J'ai fait ce qu'il vient de dire et il est temps désormais de pleurer mes péchés et de me convertir à Dieu.”

00:26:14
Il avouera par la suite: “les possédées m'avaient dit plusieurs choses, fort secrètes, dont aucun homme ne pouvait avoir connaissance.”

C'était sa conversion, c'était le 6 janvier 1636. Il est touché, il est touché par la grâce de Dieu.

00:26:38
Le premier Kériolet est mort, il va y en avoir un deuxième. Sa vie va basculer, mais complètement.

Kériolet étant Kériolet, il va dire et il va voir tout le monde, il fait une confession publique à l'âge de 34 ans, il retourne à la collégiale. A l'église le lendemain, on le montre, on le montre du doigt : “tiens voilà ton monsieur d'hier il est dans un tel état que s'il continue, il sera aussi haut dans le ciel, comme s'il lui était bas dans l'enfer avec nous.” Et l'exorciste demande qui a travaillé à son salut.

“La Vierge, la Vierge Marie, a mis les bras jusqu'au coude pour le retirer de ses ordures.”

Il est touché, touché, vraiment touché. La miséricorde de Dieu a gagné et il va aller discuter avec le père Surin, qui est un jésuite, une des grandes figures du début du XVIIè siècle. Qu'est-ce qu'il va faire? Revenir à la maison, mais il va d'abord passer par un pèlerinage à Notre-Dame de Liesse, parce qu'un jour, il avait promis, s'il échappait aussi à ça, quand même, il irait faire un pèlerinage à Notre-Dame de Liesse, mais il n'y croyait pas du tout. Mais là, il va y aller, parce qu'il se souvient quand même qu'il l'avait promis. Et il commence à se prendre un peu au sérieux. Vous situez Notre-Dame de Liesse ? c'est dans l'Aisne aujourd'hui.

D'accord il va y aller, je le cite : non, d'abord en quittant Loudun au premier clochard qu'il va rencontrer, il va lui donner ses beaux habits de gentilhomme, il va prendre les siens. Première chose.

Deuxième chose: en route, il va donner de l'argent (ça va être l'inverse de ce qu'il y avait avant). Il va toujours mendier, marcher pieds-nus.

Il dit “en passant par la ville de Paris: je ne plus trouver à loger et personne ne voulait me recevoir. Je fus contraint de me coucher dans un cimetière. Une autre fois, je m'étais arrêté dans une ville de Picardie et je suis pris pour un espion et je suis maltraité par les gueux.

Dites moi quelle est la grande ville, et ô combien célèbre, qui n'est pas très loin de Liesse ?  qui n’est pas dans le même département aujourd'hui? Oui, mais une autre, plus célèbre …. Reims, Reims.

  • Et qui allait prier à Notre-Dame de Liesses avant d'aller à Reims ?

Les rois de France, ils passaient tous prier Marie, avant d'aller se faire sacrer à Reims. Bien, tenez vous bien, je suis allé à Notre-Dame de liesse. Et si vous allez un jour demander à aller dans la sacristie, dans la sacristie de Liesse, il y a un grand tableau et vous trouvez les noms de tous les Charles, Henri, Edouard, Louis, tout ce que vous voulez, et tous les grands de ce monde qui sont passés là. Je n'invente pas. Je l'ai lu de mes yeux. Au milieu est écrit : “Pierre de Keriolet, le pénitent breton”. Oui, comme quoi, son passage a marqué.

Après ça, il revient dans son manoir de Kerlois à Pluvigner.  Et que fait-il ? Il met tous les copains de bringue dehors. “Je veux plus vous voir, serviteurs inutiles, allez, à la maison, plus besoin de vous non plus”.

Il va mener une vie dure, difficile, pire que celle des moines. Le père Dominique écrit “ souvent il demeurait cinq à six heures de suite à genoux. Sa vie n'a été qu'une mort continuelle, depuis le premier moment de sa conversion. Il avait été excessif, et le mot je pense est faible, excessif dans le mal, il va être excessif dans le bien. Il devait être insupportable dans les deux camps. Il s'était promis, lors de sa conversion à Loudun de faire le plus de mal possible à son corps et le plus de bien possible aux autres.

Et c'est exactement ce qu'il va faire. Et quand il revient à Kerlois, qu'est-ce qu'il voit ? Que le pèlerinage de Keranna est en pleine évolution, qu'on fait des constructions, la chapelle de Nicolazic est maintenant remplie de prières, et les pèlerins viennent de plus en plus nombreux. Monseigneur de Rosmadec fait appel aux carmes en 1628, et les carmes vont arriver là, et c'est les carmes qui vont accueillir Kériolet converti. Et le supérieur des carmes, le père Dominique de sainte Catherine, recueillir ce qu'il a écrit dans ce livre là, écrit dans ces années là.

Quand on le voit prier, les gens se moquent de lui. Il est encore en train de nous bluffer, il est encore en train de nous mentir, il est en train de jouer un jeu. Encore, non, non, non, ce n'est plus un jeu. C'est vrai.

Que va il faire ? Il va transformer son château en hôpital, il va aller chercher les mendiants, les clochards, tous les plus pauvres du coin, il va les nourrir et il va les soigner. Il va tout faire, mais tout faire pour eux et donner tout son argent pour les plus pauvres de la région. Il va donner de l'argent pour les constructions à Sainte-Anne, il va donner de l'argent pour construire un hôpital à Auray. Il va se dépouiller complètement. Il dit: je savais pas trop où me retirer, je pensais me faire ermite. Devant sa piété et sa vie complètement transformée, un jour, quelqu'un lui dit: pourquoi tu serais pas prêtre? Il dit qu'il n'y avait vraiment jamais pensé.

Mais le père Dominique écrit ceci: la première demande que notre converti fit à Notre Seigneur dans toutes ses retraites fut qu'il lui fit connaître par quel moyen il pourrait le plus parfaitement accomplir sa volonté.” Il a d'abord cru le faire en faisant tous les biens, tout le bien possible pour les pauvres et en défendant les gens. Notre seigneur lui inspira d'autres dessins, il l'appela à la cléricature. Il eu peine à se résoudre à s'engager dans cet état dont il s'estimait tout à fait indigne, ne pensant pas avoir toute la pureté de cœur et d'esprit qui est requis pour traiter le plus Auguste des Sacrements.

Mais il aime mieux obéir à dieu, aux conseils de ses amis et de son directeur, (c'est-à-dire lui même le père Dominique), que de s'attacher trop opiniâtrement à son propre jugement. T

Tnez vous bien, il s'était converti le 6 janvier 1636. Il a été ordonné prêtre à la cathédrale de Vannes (chez-vous) par monseigneur de Rosmadec le 28 mars 1637 ! A faire rêver les séminaristes d'aujourd'hui pour la longueur des études!

La tradition dit, et c'est ce que dit le père Dominique dans son livre. La tradition dit que c'est une tradition, mais il cite: que lorsque monsieur de Rosmadec a voulu prendre ses mains pour faire l'onction avec le saint chrème, il les a retirées et que Mgr de Rosmadec a dû reprendre les mains pour faire l'action.

Le bandit est devenu prêtre.

Qu'est-ce qu'il va faire? Il va rester dans son château. Monseigneur de Rosmadec va lui dire de continuer tout ce qu'il faisait pour le soin des pauvres. Il va encore accentuer parce qu'il va faire construire. Quand on regarde son château, c'est sur la gauche, il y a un bâtiment plus récent, plus récent que le centre du château. Il avait fait construire là  un bâtiment comme réserve de vêtements et de chaussures pour les pauvres. Il avait une attirance, une attention pour les pauvres. Il écrit ou il dit : chaque pauvre que je recevais, je le regardais comme Jésus, si j'en rencontrais de bien malade, c'était pour eux que j'embrassais c'est eux que j'embrassais plus volontiers, pensant en moi même peut être “voici notre Seigneur. Je rappelais en ma mémoire ce qui était arrivé à Saint-Martin, Saint-François et à d'autres saints. Et le père Dominique écrit encore ceci : “pour imiter la naissance du fils de Dieu dans la pauvreté d'une étable, il choisit l'écurie des chevaux pour sa demeure et le foin et la paille pour se reposer”. Il a célébré la messe dans une chapelle qui avait d'abord appartenu à sa famille, une chapelle qui est à deux kilomètres par la route, parce qu'il faut faire un détour, mais beaucoup plus près si on traverse par les champs.

Et Dieu ayant de l'humour cette chapelle, c'est Notre-Dame de Miséricorde. On ne peut pas faire mieux.

Et le père Dominique crée encore cette chapelle, lui a plus servi de logement et de vie que sa propre maison. Il y passait des journées entières, excepté le temps de ses repas et celui qui l'employait à servir le dîner aux pauvres.

….

Il fut un pèlerin infatigable. Il a fait des pèlerinages à ne savoir qu'en faire. Je vais vous lire une étape d'un de ses pèlerinages. Ça, on ne trouve pas ça dans le livre du père Dominique, mais on trouve ça dans les lettres du père Surin.

Il va à Saint-Jacques-de-Compostelle. Je lis : non, d'abord le père surin, qui était exorciste Loudun, se trouve dans la communauté des jésuites à bordeaux. Kériolet et lui se connaissaient. Le père Surin écrit qu’il est passé en allant à compostelle, mais le portier l'a mal reçu. Il est parti et il revient, et il frappe à nouveau à la porte des jésuites de bordeaux. Et là il va être accueilli. Et qui se trouve là ? Mgr le prince de Conti, et aussi, monsieur le duc d'Enghiens. Monsieur le prince de Conti qui, pendant le temps qu'il faut au collège, le tenait quasi tous les jours à sa table. Car le Prince logeait proche du collège, il n'y avait qu'une muraille de séparation entre son logis et le nôtre c’est par une porte qu’il entrait dans notre jardin. Kériolet traitait avec les princes avec une grande simplicité et un mépris du monde éclatant. Sa vie était, dès qu'il était levé, d'aller en quelque église où il était  à dire la messe et à prier jusqu'à midi. Quand il entendait midi, il allait dîner là où il était convié. Il est resté cinq semaines là. Tout l'après midi, il était en conversation, profitant beaucoup aux âmes. Il vivait sans respect qu'humain il touchait les esprits par ses propos. Il parlait aux grands et aux princes et leur disait les vérités, car il marquait clairement ne se soucier que de Dieu.

Kériolet racontait très facilement sa vie, la première partie de sa vie, sa conversion. Il racontait et dit, et dit: le Surin le prince de Conti a été très marqué par la figure de Kériolet. J'ajoute quelque chose que j'ai trouvé ailleurs: le Prince de Conti avait été le condisciple de Molière au collège des jésuites de Clermont. Puis, des années plus tard, le Prince de Conti était l'un des proches de Molière, et était son mécène. Et si le Prince de Conti a raconté à Molière la vie de Kériolet, il n'est pas impossible que la vie de Kériolet est servie de base au don Juan de Molière … possible ?

Je lis : c'est à la fin, à la fin du Don Juan en molière dont je en parle.

Le ciel a inspiré à mon âme le dessin de changer de vie et je n'ai point d'autres pensées maintenant que de quitter entièrement tous les attachements du monde et de me dépouiller au plus tôt de toute sorte de vanité, de corriger désormais par un austère conduite, tous les dérèglements criminels où m'a porté le feu d'une aveugle jeunesse. Gagnarel lui répond : monsieur, rendez-vous à tant de preuves et jetez vous vite dans le repentir. Don Juan, il ne sera pas dit, quoi qu'il arrive, que je sois capable de me repentir.

Bien sûr, ce n'est pas une certitude, mais après tout, pourquoi pas?

(Je passe des pages et des pages … autrement, on va me faire des gros yeux et on trouve encore beaucoup de choses dans des lettres.Voyez, on va parler de Kériolet dans les courriers du père Suren, le courrier de sœur Jeanne des Anges, qui était la supérieure des religieuses de Loudun et d'une de ses amis, madame du ou, qui habitaient à Rennes. Dans toutes ces conversations, on parle de Kériolet, mais je n’ai pas le droit de le lire.)

Il est tombé. Kériolet était resté malade en 1658 et il va mourir dans l'une des cellules des carmes. Keranna c'était le 8 octobre 1660.

Telle fut la vie de Pierre Le Gouvello de Kériolet, et quand il est mort, on l'a enterré au pied de l'autel dans la chapelle construite par Nicolazic. Il y avait Nicolazic et, à côté de lui, Kériolet. Et qu’a il été écrit sur sa tombe ?

“Ci-git Pierre de Kériolet, conquête de la Vierge Marie.”

On n'a on n'a pas écrit ça sans raison, c'est que les gens avaient vu qu’il y avait beaucoup de dévotion à la vierge marie et que le fait, ce bruit qui disait que, qu'il disait un je vous salue marie tous les jours. Oui, pourquoi pas?

(Est-ce qu'on me donne encore quelques minutes maintenant ?

L'histoire ce n'est pas banale, ça vaut le coût.  Mais qu'est-ce que ça veut dire ça ? Qu'est-ce que ça veut dire derrière? De quoi est il question là?

Il est question de la miséricorde de Dieu, il est question de la grâce de Dieu, de la grâce de Dieu qui pardonne, qui pardonne tout, sa jeunesse terrible mais terrible, et surtout l'orgueil, l'orgueil de Kériolet.  

Un jour, il a fait ceci, il y avait de l'orage il a pris son pistolet, il a tiré au ciel. Ça veut dire quoi? Ça ça veut dire si je pouvais, je te tuerai. Il n'y a pas pire. La démesure de l'orgueil humain. Kériolet avait une idole, laquelle ? lui même, lui même, il était sa propre idole, il s'adorait, il ne pensait qu'à lui, lui, lui, lui, devant : premier. Je n'ai besoin de personne, je veux me faire moi même tout seul.

L'orgueil l'orgueil, la démesure de l'orgueil humain.

La grâce de Dieu a quand même été forte. (Dites moi, mais vous n'aurez pas, je suppose que vous n'aurez pas la réponse plus que moi.(

  • Pourquoi Kériolet s'est il converti à Loudun et pas Urbain Grandier ?

Je ne sais pas pourquoi a t il été converti devant un parterre de religieuses possédées. Autrement dit, pourquoi s'est il converti là où le diable se manifestait ?

Je me permets de dire ceci : cette conversion devant des religieuses possédées, où satan lui dit des choses les plus bizarres: “tu seras avec moi, tu aurais été avec moi” eh bien, je dis que Dieu a joué son dernier joker. Je ne sais pas si la formule est bonne, mais Dieu a été, on va dire, au plus loin, il a été au plus loin.

Il y a quelque chose de troublant dans la vie de Kériolet, parce que, quelque part, c'est un personnage attachant par certains côtés.

Et pourquoi ?

Parce que même s'il faisait le mal, il le faisait avec panache ! Oui, ce n'était pas un vulgaire malfra, vulgaire, nul, mais non, il n'était pas nul, il faisait le mal avec panache.

Il faut faire attention si on s'attache à un personnage comme ça, même si j'ai beaucoup étudié sa vie. Oui, quelque part, il est attachant et c'était un “grand” quelque part. Oui, mais chez-lui, l'orgueil a tout faussé, tout, tout, tout, tout.

On rejoint la phrase de la Genèse : “vous serez comme des dieux”. On a l'impression que, quelque part, il vivait ça, qu'il était dieu. Il était son propre dieu, il n'en voulait pas d’autres ! ça, c'est terrible, terrible! Nous sommes en plein mystère, le mystère de la conversion, le mystère de ce couvent de religieuses possédées ce mystère de la grâce de Dieu qui tombe sur lui et pas sur le curé de Loudun.

 Et on est à une époque, au 17è siècle, où règne le jansénisme chez les religieuses de Port Royal, où il fallait être bien, bonne, ou il fallait être moralement parfait. C'était janséniste ! Un des aspects du jansénisme c’est qu’il faut être moralement parfaite. Comme disait l'archevêque de Paris : “ les religieuses de port royal sont pures comme des anges, mais orgueilleuses comme des démons.” Autrement dit, ce qui fausse surtout, c'est l'orgueil … c'est l'orgueil !

Encore une chose: rien n'est jamais perdu dans la vie de quelqu'un, jamais, jamais, jamais, rien n'est perdu. On peut toujours se convertir, toujours, toujours, toujours, c'est possible.

La preuve, dernière chose : l'aumône;  il a toujours fait l'aumône. Dans la première partie de sa vie, il donnait. Converti, il a donné, tout donné, et il a même fait plus. Il s'est donné lui même jusqu'à user sa santé. Vraiment, il a toujours fait. Il a toujours été généreux, mais la manière n'était plus la même, l'intention n'était plus la même. Dans la première partie de sa vie, du haut de son cheval, il laissait une pièce aux petits avec condescendance, mais pas dans la deuxième partie de sa vie. Vraiment, il donnait avec tout son cœur. Sa manière avait changé, autrement dit, son cœur s'était converti. C'est cela la miséricorde de Dieu.

Et au pire des bandits, Dieu dit, mettant Kériolet au lieu du bon larron. “Je te le dis aujourd'hui, avec moi, tu seras dans le paradis.”

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