Homélie prêchée par le père Marivin à la messe de 11 heures
Homélie 5ème dimanche ordinaire B 2024 ( prononcée à la messe de 9h30)
Le Bon Dieu a souvent de l’humour et en voici la preuve !
Le tout premier récit de guérison dans l’Evangile de Marc… nous parle d’une belle-mère !
Qu’elles soient idéalisées, aimées ou mal aimées, les belles-mères sont un peu le symbole de ces relations que nous n’avons pas directement choisies et qu’il faut pourtant intégrer dans notre vie. Elles représentent ce qui surgit dans notre liberté, dans notre intimité parfois.
Et comme pour la belle-mère de Pierre, lorsqu’un évènement non voulu ou subi vient bousculer le cours de notre vie, nous sommes naturellement pris de fièvre.
Mais il y a fièvre et fièvre. Entendons-nous bien. Il ne s’agit pas de nier la maladie organique, telle que la grippe, le COVID, ou tant d’autres maladies qui nous clouent au lit sans que nous ayons notre mot à dire ! Ces fièvres-là sont bien réelles. Chacun a pu en faire l’expérience et être obligé de constater qu’il n’y pouvait rien, sauf à consulter un médecin, ou garder la chambre en attendant que ça passe.
Et puis, il y a les fièvres qu’on pourrait qualifier d’« émotionnelles ». Celles qui nous échauffent l’esprit lorsque la vie ne suit plus son cours normal.
Maladie, deuil, échec professionnel, rupture, changement accidentel : parfois nous préférons subir que faire face et notre psychisme se met sur la défensive. Confrontés parfois à la souffrance ou à la précarité, il nous arrive de démissionner, de ne pas choisir ce qui va vers la vie, de ne plus habiter notre existence !
Le cri de Job que nous avons entendu dans la première lecture est, je crois, de cet ordre. «Vraiment la vie de l’homme sur terre est une corvée !... A quoi bon vivre ? »… Notre monde contemporain est très proche de celui de Job. Davantage qu’une crise de foi, nous traversons une crise de confiance « intérieure » par manque d’Espérance !
Face à cette question radicale du sens, un chemin nous est proposé dans l’Evangile. Regardons ce que fait Jésus dans ce récit de guérison. Ou curieusement ce qu’il ne fait pas ! Il ne prie pas ! Il n’invoque pas Dieu ! Il n’invite pas à croire ! Il ne dit rien ! Il n’y a pas d’éclat de voix !
Comme le font tant de visiteurs de malades, Jésus s’approche et prend la main. Il prend la main et non la parole et cela remet debout la malade.
La guérison est intime et silencieuse. Elle se passe au cœur même de la vie de tous les jours, au domicile même de Pierre, qui vient d’être appelé pour devenir pécheur d’hommes.
Et que fait la belle-mère, une fois guérie ? Elle se lève et se remet à servir, c’est tout.
Cet évangile nous amène à nous poser 2 questions :
- Est-ce qu’un jour dans ma vie, Jésus m’a tendu la main, m’a sorti de ma « fièvre » et remis en route pour faire mon travail ? Je crois que beaucoup d’entre nous peuvent témoigner qu’ils ont perçu la main de Jésus sur leur épaule, alors qu’ils étaient « cloués », tétanisés, par un avenir sombre. N’oublions jamais que Jésus nous tend toujours la main dans nos épreuves.
- Lorsque Jésus tend la main et redonne du tonus aux malades, n’est-ce pas lui qui devient celui qui nous sert ?
Le pape François dans son invitation pour le carême nous dit : « Laissons nous servir par le Seigneur », dans la Parole, l’eucharistie, les sacrements et nos relations avec « le frère », ( et j’ajouterai à l’exemple de Charles de Foucauld).
Lorsque Jésus nous tend la main et nous tire hors de notre marasme, de notre fièvre, alors il est notre serviteur, envoyé par le Père, pour que nous nous levions et que nous reprenions notre tâche.
Se relever et se remettre à servir, avec l’aide de Jésus. Voilà le vrai sens de la vie !
Et si la guérison que fait le Christ aujourd’hui était un double appel
- HABITER autrement sa vie pour faire en sorte de retrouver le sens de l’altérité, de la fraternité ? C’est notre tâche, notre labeur, notre « labour ».
- Habiter autrement sa vie intérieure, pour retrouver le sens de l’intériorité, là où demeure Dieu.
Pour celui qui se met à l’école de cet évangile, la vie n’est pas une lutte fiévreuse contre les éléments étrangers. Elle est une habitation de soi dans la confiance, qui s’extériorise toujours dans le service. Car servir, c’est fondamentalement imiter Jésus. «Libre à l’égard de tous » nous dit Saint Paul. Servir, c’est oser exister en accueillant ce que nous n’avons pas choisi. C’est tendre la main pour relever ceux qui sont abattus.
Et MERCI… Chère… Belle-mère de Pierre toi qui t’es laissée guérir !
O Seigneur, guéris-nous, sauve-nous, donne-nous la paix ! AMEN.
P. Patrice Marivin