Homélie du 10 décembre 2023

« Préparez le chemin du Seigneur. »

Telle est l’invitation que nous avons entendu raisonner dans la 1^ère Lecture et dans l’Évangile. Effectivement, en cette période de l’avent, nous voyons nos chemins être transformés ; nos rues s’ornent d’illuminations, les vitrines et les balcons se parent de toutes sortes de décorations. A l’intérieur de nos maisons aussi, nous préparons le chemin qui conduit à Noël : on dispose un sapin, on réalise une crèche, on affiche un calendrier de l’avent…

Alors est-ce qu’en faisant tout cela, nous préparons le chemin du Seigneur ?

En ce 2^ème dimanche de l’Avent, nous sommes invités à passer de la décoration à la préparation.

Cette période de l’avent est bien une préparation mais elle est plus que cela, elle est un commencement. Vous savez que l’année liturgique commence au 1^er dimanche de l’avent. Aujourd’hui nous assistons même au commencement de la lecture d’un évangile. Le commencement d’un écrit et particulièrement d’un évangile doit retenir notre attention car c’est là que l’auteur, inspiré par le Saint-Esprit, nous donne les bases pour entamer ce chemin avec le Christ. Saint Marc commence son récit par une citation du prophète Isaïe que nous avons entendu en 1^ère lecture.

Réécoutons ce que nous dit Isaïe : « Une voix proclame : ‘‘Dans le désert, préparez le chemin du Seigneur’’. » Par ces 3 petits mots : dans le désert, Isaïe nous indique à quel niveau se situe cette préparation à accueillir le Fils de Dieu. Dans notre vie quels sont nos déserts ? Le désert c’est un lieu ambivalent dans la Bible car c’est le lieu de la sécheresse, le lieu de l’aridité et c’est aussi le lieu de la rencontre en vérité, le lieu du cœur à cœur, où il n’y a plus de façade pour se cacher ou pour faire diversion. Nous avons tous des déserts dans notre vie, des lieux que nous ne fréquentons plus car ils nous paraissent trop arides, des situations qui sont devenues taboues et que l’on croit stériles. Pourtant c’est au cœur de ces déserts que le Seigneur veut faire son chemin. C’est dans la sècheresse de notre existence qu’il veut faire sa demeure.

Le désert c’est un lieu impressionnant, un lieu qu’il faut apprivoiser. Dans l’antiquité chrétienne, lorsque les périodes de persécutions cessèrent, les chrétiens qui voulaient suivre le Christ d’une manière radicale quittaient tout pour aller vivre au désert. C’est aussi ce que vivra un Saint Charles de Foucauld plus récemment. Le désert comme lieu de rencontre avec Dieu, c’est ce que nous sommes appelés à expérimenter particulièrement en ce temps de l’avent. Et si nous avançons cette année sur ce chemin avec Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, il nous faut contempler ce grand désir qu’elle a eu d’entrer au Carmel. Ce n’est rien d’autre que cet appel radical au désert. Elle a eu cette foi qu’elle ne serait jamais aussi proche de Dieu qu’en laissant tout pour le suivre. Cette soif d’absolu de la rencontre avec Dieu n’est pas réservée aux carmélites et aux ermites ! Elle concerne chacun d’entre nous. Dieu nous dit par la bouche du prophète Osée : « je vais te séduire, je vais t’entraîner jusqu’au désert, et je te parlerai cœur à cœur.^[1] »

Dans nos quotidiens bouillonnants d’activités, dans nos vies entourées de lumières et de bruits qui ne nous laisse pas de répit, il est vital de nous créer notre lieu de désert. Ce lieu où l’on peut souffler et laisser à Dieu toute sa place. Ce lieu il peut être physique, chez soi, une sorte de « sanctuaire domestique » mais ce désert doit surtout être un temps. Un temps où rien d’autre ne compte que ce cœur à cœur avec le Seigneur, ce que Sainte Thérèse vivait dans l’oraison.

C’est comme si le Seigneur nous disait : « Contente-toi de venir me trouver au désert, ensuite c’est moi qui aplanirai les chemins de ton âme, c’est moi qui rendrait droit les sentiers de ta vie. » Ce n’est rien d’autre que ce que prêche Saint Jean-Baptiste lorsqu’il parle du baptême de conversion. C’est précisément cette étape qui dépend de nous : la conversion. Se convertir c’est se retourner vers Dieu, c’est reconnaitre nos péchés pour nous laisser sauver par lui.

En ce temps de l’Avent, ne nous laissons pas disperser par toutes les préparations extérieures mais préparons l’intérieur. Retirons-nous au désert pour nous laisser séduire par Dieu. Ce cadeau qu’il nous prépare pour Noël, ce n’est pas un objet mais c’est son propre fils qui veut prendre place dans nos vies. Avec Sainte Thérèse, retirons-nous au désert pour nous laisser aimer par Dieu qui nous dit : « je vais te séduire, je vais t’entraîner jusqu’au désert, et je te parlerai cœur à cœur. » Amen.

Père Thibault

 ^[1] Cf. Os 2, 16.