Homélie du 3 septembre 2023

22è dimanche du temps ordinaire

En ces heures de rentrée, la Parole de Dieu nous rejoint par des phrases fortes, dans ce qu’il y a de plus essentiel dans nos vies. Elle nous parle de nos préférences, de nos priorités, de nos choix. Et loin de rester à un niveau conceptuel, idéalisé, un peu éthéré, il s’agit bien du plus concret de nos jours, des petites ou des grandes décisions à prendre, de la vraie place que nous donnons à Dieu et aux autres. De notre capacité aussi à nous laisser interroger, déplacer, sortir de nos habitudes, de nos assurances, de tout ce que nous avons installé dans nos existences.

Tout cela résonne dans les textes très riches que nous venons d’entendre.

Aujourd’hui Jésus dit à Pierre : « Passe derrière moi Satan », alors que la semaine dernière, il disait à ce même Pierre : « Tu es Pierre et sur cette Pierre je bâtirai mon Eglise ».

Quel revirement ! Dimanche dernier, Pierre était encensé, et aujourd’hui, il est franchement recadré ! Pourquoi ?

SI Jésus tient des propos si durs à Pierre c’est pour lui faire comprendre qu’on ne devient pas disciple en un jour même si on a parfois des flashs de clairvoyance qui peuvent faire croire qu’on a tout compris ! Non ! Jésus dit un peu vivement à Pierre qu’il faut sans cesse réapprendre se remettre en question et à réajuster sa foi en Dieu.

Pierre, comme beaucoup de ses contemporains, croit « dur comme fer » que Jésus est celui qui doit réussir brillamment « aux yeux de tous », puisqu’il est le Messie et le Libérateur que tout le monde attend. Mais il a tout faux !

C’est pourquoi la réprimande que Jésus lui adresse provoque en lui un électrochoc, elle lui ouvre les yeux. Elle fait voler en éclat ses illusions et par voie de conséquence, les nôtres.

Jésus ne va pas par 4 chemins pour affirmer que celui qui a comme projet de vie le souci de sa petite personne, son train de vie, ses loisirs, les « like » de ses réseaux sociaux, avance en réalité dans une impasse.

Dès le début de sa mission, Jésus a renoncé à emprunter les chemins du pouvoir, de l’avoir et du valoir, en disant au Tentateur « Arrière de moi Satan ». Et c’est à ce même renoncement qu’il invite Pierre, et nous-mêmes, si nous voulons devenir disciples. « Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. »

Puis-je ici sous forme de méditation vous offrir une méditation lumineuse de Benoit XVI :

« Seigneur Jésus Christ… Nous sommes attachés à notre vie. Nous ne voulons pas l’abandonner, mais la garder totalement pour nous-mêmes. Nous voulons la posséder, non l’offrir. Mais tu nous précèdes et tu nous montres que c’est seulement en donnant notre vie que nous pouvons la sauver… La croix, l’offrande de nous-mêmes nous pèse beaucoup. Mais sur ton chemin de croix, tu as porté aussi ma croix, et tu ne l’as pas porté en un quelconque moment du passé, car ton amour est contemporain à mon existence. Tu la portes aujourd’hui avec moi et pour moi…

Aide-nous non seulement à t’accompagner par de nobles pensées, mais à marcher sur ton chemin avec le cœur, plus encore avec les pas concrets de notre vie quotidienne… Libère-nous de la peur que notre vie puisse nous échapper si nous ne saisissons pas ce qu’elle nous offre. Aide-nous à démasquer les tentations qui nous promettent une vie éphémère, mais dont les conséquences nous laissent, en fin de compte, sans but et déçus. Aide-nous à ne pas nous faire maîtres de la vie, mais à la donner. En t’accompagnant sur le chemin du grain de blé qui tombe en terre pour donner beaucoup de fruit, aide-nous à trouver, « en perdant notre vie », le chemin de l’amour, le chemin qui nous procure véritablement la vie, la vie en abondance ». (Rome, vendredi saint 2005).

Mes amis, aujourd’hui, Dieu lui-même nous lance un appel dans la 2è lecture :

« Ne prenez pas pour modèle le monde présent, mais transformez-vous en renouvelant votre façon de penser pour discerner quelle est la volonté de Dieu : ce qui est bon, ce qui est capable de lui plaire … »

Quelle est notre préférence ? Ce qui plait à Dieu ou ce qui nous plait ?

Avec la rentrée scolaire et la reprise du travail on va de nouveau avoir le sentiment de manquer de temps ....

Mais manquer de temps pour quoi ? Pour qui ? Après quoi allons-nous courir toute l’année ?

Comme le propose  le pape François, « lâchons un peu les écrans de nos smartphones, pour ouvrir l’évangile »

Prenons exemple sur le prophète Jérémie, qui voit, la Parole de Dieu, « comme un feu brûlant d’amour ». La Parole de Dieu l’a bousculé et l’a amené revoir sa manière de vivre. « Seigneur, tu m’as séduit et j’ai été séduit ; tu m’as saisi, et tu as réussi ».

Pour terminer, après avoir cité Benoit XVI, j’aimerais citer notre frère et ami le Père François CORRIGNAN dont les obsèques ont été célébrées jeudi dernier. En 2017, dans son livre « Mettez votre cœur au large » qui retrace la spiritualité de Saint François de Sales, voici ce qu’il mentionne :

« Nous sommes des pauvres gens qui ne pouvons guère bien faire ; mais Dieu qui est infiniment bon, se contente de nos petites besognes. Il nous accompagne sur le chemin, nous relève de nos chutes et nous soutient de la force de son Esprit et des sacrements. Lui qui est plus grand que notre cœur remplit déjà notre cœur de la joie de son son Fils Ressuscité. »

AMEN.

Père Patrice Marivin