4è dimanche de Pâques - Année A
C’était il y a trois semaines, le jour de Pâques. Dans la sacristie, notre Evêque se prépare. Un jeune enfant de chœur s’approche et lui demande : « la crosse que vous tenez, à quoi ça sert ? »
C’est un bâton de berger, lui a-t-on répondu. Alors, en lisant l’évangile de ce jour, je me suis dit que ce serait un beau symbole à présenter à tous les enfants que nous sommes.
C’est d’abord un bâton solide pour marcher avec assurance et guider le troupeau sur les chemins escarpés de la vie. « Si je traverse les ravins de la mort, dit le psaume 22, je ne crains aucun mal car ton bâton me guide et me rassure.
C’est aussi un bâton pour défendre le troupeau contre le loup et toutes les bêtes féroces qui menacent les brebis. Jésus le premier a du affronter cet adversaire à plusieurs reprises, du désert jusqu’à la croix, pour nous défendre, au prix de sa propre vie !
Mais ce bâton, il est recourbé à son extrémité, comme la crosse : c’est pour retenir les brebis qui pourraient tomber dans le ravin, et plus souvent encore pour attraper l’un d’entre elles au milieu du troupeau et la soigner.
Ce bâton est d’ailleurs le symbole de tous les pasteurs du peuple d’Israël qui ont précédé Jésus, et particulièrement Moïse qui libéra son peuple de l’esclavage en ouvrant un passage dans la Mer Rouge avec son bâton, et qui fit jaillir de l’eau dans le désert, en frappant un rocher avec son bâton, comme plus tard un soldat frappera avec sa lance le cœur de Jésus d’où jailliront l’eau et le sang.
Ce symbole a été souvent utilisé par les rois de ce monde, sous forme d’un sceptre, symbole de puissance. Mais ces bâtons-là, généralement, ne touchaient pas terre.
Alors que le bâton de Jésus, lui, descend jusqu’à terre et même jusque dans nos enfers, particulièrement le samedi saint, et il se dresse jusqu’au ciel : c’est le symbole de la croix, de l’arbre de vie.
Mais Jésus nous donne une autre image dans cet évangile ; il est aussi la porte de la bergerie, qui nous permet d’y entrer, et de nous en faire sortir pour nous conduire vers la maison du Père : « Je suis venu pour que les brebis aient la vie et la vie en abondance » dit Jésus, car il ne s’agit pas seulement de nous procurer de l’herbe fraiche, du vin aux noces de Cana et du pain multiplié, toujours en surabondance, mais par–dessus tout, de la vie éternelle, surabondance de la miséricorde de Dieu !
La bergerie, c’est l’Eglise, où le Christ rassemble son peuple. Et c’est l’Eglise, corps du Christ qui prend soin à son tour des brebis par les sacrements.
La porte, c’est le lieu du passage (Pâques), vers la sortie d’Egypte, vers la fin de l’esclavage, vers la liberté, mais aussi vers les grands espaces, vers le grand large ! Mais pas seulement pour le troupeau en général, peut-être même d’abord pour chacun d’entre nous; sinon, il n’y aurait pas de troupeau.
Jésus, le bon berger, en effet, connait chacune de ses brebis, c'est-à-dire chacun d’ente nous, et il l’appelle par son nom, même au milieu d’une foule. Rappelez-vous : « Zachée, descends-vite, aujourd’hui il me faut demeurer chez toi » ! Et puis au jour de joie de sa résurrection, lorsqu’une femme se tient en larme devant le tombeau vide, Il l’appelle par son nom : « Marie », pour qu’elle se tourne vers la lumière et le visage de son Seigneur ressuscité.
C’est chacun de nous qu’il appelle ainsi encore aujourd’hui : Michel.., Isabelle…, Etienne …: « descend de ton arbre, je suis la Vie, viens et suis-moi ! »
Les faux bergers, eux, ne connaissent par leur brebis. Ils ne veulent pas d’abord leur bien mais satisfaire leur propre soif de pouvoir et de vaine gloire. C’est l’exemple de Hitler, que son peuple acclamait à Berlin en 1936, et qu’il conduisit à la folie d’une guerre mondiale et au désastre. Et c’est à toutes ses victimes déportées dans l’enfer des camps de concentration que nous rendons hommage aujourd’hui.
Aujourd’hui, plus que jamais, nous sommes appelés par le Seigneur lui-même à suivre Jésus , le bon berger, en écoutant sa parole et en la mettant en pratique. C'est-à-dire tout simplement à vivre de notre baptême. « France, qu’as-tu fait de ton baptême », disait Saint Jean-Paul II en 1980. « Qu’as-tu fait de ton frère ? », nous dit aussi la bible (Gen 4,10), dans ce commandement d’amour qui est semblable au premier. « Qu’as-tu fait de la terre que je t’avais confiée ?», nous dit encore l’Esprit Saint aujourd’hui à travers l’Eglise devant les signes de ce temps.
Oui, quelle que soit notre situation, là où nous en sommes, nous sommes appelés à entrer dans « la joie de la conversion», comme nous y invite notre livret de Pâques « 50 jours pour nous laisser guider par l’Esprit Saint » !
Ecouter la voix du Bon Berger, particulièrement en ces temps modernes, c’est d’abord entrer dans une écoute intérieure. Non pas dans l’agitation, le bruit et la fureur du monde et de ses réseaux sociaux qui tournent en boucle, mais dans le silence du cœur et de la prière, dans la brise légère de l’Esprit Saint. Non pas dans la colère et la rancune, mais dans la délicatesse, l’humilité et le pardon.
Nous prions aujourd’hui pour les vocations particulières si nécessaires de ministres consacrés pour le service de l’Eglise et l’annonce de la Parole de Dieu. Mais chacun de nous, au nom de son baptême, en entrant dans la vraie joie du matin de Pâques, est également appelé à faire entendre à nos frères la voix du bien-aimé, et à marcher ensemble vers la maison du Père, en nous laissant conduire par l’Esprit Saint.
Etienne ROGINSKI - Diacre