Chers amis,
C’est avec une vraie joie, une belle gratitude et une véritable humilité que je célèbre parmi vous mes 25 ans de sacerdoce ! Tant je sais «la grave allégresse » d’être prêtre aujourd’hui. Avec vous je suis chrétien, pour vous je prêtre et j’espère être et devenir toujours plus pasteur selon le Cœur de Dieu !
Pour ce soir, je vous propose trois pistes de réflexion pour notre méditation : le Christ, le collectif (L’Église) et la mission !
- Le Christ et sa Parole
Viens Esprit Saint, avons-nous chanté au seuil de cette messe. Souvent je me demande qui suis-je pour avoir reçu l’appel du Christ et la confiance de l’Église ? Qui suis-je pour avoir eu la grâce d’être nommé dans des missions diverses et variées qui m’ont enrichies et fait grandir humainement et spirituellement ? Je ne vous cache pas que je suis comme saisi quand je mesure l’écart entre ce que je suis appelé à vivre et ma faiblesse, voir mon péché. Et je sais mon inconséquence, mon orgueil et ma fragilité. Le curé d’Ars disait : «Si le prêtre savait ce qu’il est, il mourrait ».
«Dieu aime celui qui donne joyeusement » dit Paul aux Corinthiens dans la première lecture. J’y crois fermement. Pour cela, je mesure de plus en plus que je dois passer du temps en présence du Seigneur pour être avec lui. A travers la messe quotidienne, la fidélité au bréviaire, la méditation et l’oraison et la prière du chapelet. Si un prêtre ne prie plus, il ne peut plus porter de fruits.
Devant vous, j’ai conscience que je dois me laisser pétrir, modeler, par le Christ et sa Parole, rester à son écoute et à son école. La première joie du prêtre que je suis consiste à demeurer avec Jésus qui est un ami et un allié. Comme une graine plantée en terre qui pousse, qui germe, grandit et donne des fruits – sans savoir comment – l’essentiel de la vie du prêtre ne dépend pas de lui mais de la grâce de Dieu et de son action secrète et indispensable sur lui et sur ceux dont il a la charge. D’abord être au Christ et à son écoute, pour ne pas être étouffé par la tâche. Si le monde prêche la production et la réussite, l'Évangile prêche la fécondité, l’intériorité.
Le ministère des prêtres n’est pas : prendre ou profiter ; nous ne sommes pas des commerciaux du sacré qui auraient droit à un retour sur investissement ! Non, notre ministère est celui de la gratuité : tout donner et tout offrir, d’abord au Christ qui donne tout et ne reprend rien et ensuite à la communauté paroissiale.
La vocation du prêtre est de dévoiler la paternité de Dieu tout en se retirant devant elle, par l’acceptation du célibat.
Le rude combat du célibat et de la chasteté, si peu compris aujourd’hui et malheureusement parfois bien soupçonné. Permettez que je cite ici Mgr MACAIRE dans un petit livre intitulé : «Aimons nos prêtres ». Il parle du célibat comme d’une pauvreté par laquelle Dieu peut passer.
«C’est pour cela que le célibat est si important pour nos prêtres : il nous établit dans un incomplétude, un besoin permanent, une soif inépuisable de miséricorde. Il amplifie la blessure concrète. Elle est parfois souffrante de notre humanité. C’est une souffrance, mais une souffrance pour le Seigneur, c’est une faiblesse, mais une faiblesse consentie pour se donner totalement, pour pouvoir parler les yeux dans les yeux à tous ceux qui souffrent sans l’avoir choisi, à toutes les personnes porteuses de handicap, à toutes les personnes seules, aux plus pauvres. Notre célibat, comme les blessures du Christ, est une pauvreté. Et c’est précisément par là que Dieu passe ».
- L’Église et le collectif
Dois-je vous avouer ici que je redécouvre de plus en plus ce que veut dire le ministère non pas du prêtre mais des prêtres ? En allant prier à la crypte de la cathédrale ce matin près de Mgr GOURVES, l’évêque qui m’a ordonné, j’ai ressenti combien il est bon de situer le ministère du prêtre dans la collaboration épiscopale avec un esprit d’obéissance, de confiance, de fidélité, et avec des sentiments de cordialité et non de rivalité avec les membres du presbyterium. Je ne suis pas à mon propre compte, je n’ai choisi aucune de mes nominations, je les ai reçues dans la confiance...
Aujourd’hui, les prêtres que je rencontre ont le style qui leur convient : certains portent la soutane, d’autres mettent une cravate, et, d’autres encore arborent des chapeaux ou même des képis ! …Crânes rasés ou chauves, barbus ou glabres …. tout cela m’importe peu car ils sont, surtout, des confrères aux styles et aux sensibilités diverses, et je sais que tous, ils ont été choisis par grâce et don de Dieu pour servir notre diocèse de Vannes. Nous autres prêtres, nous pouvons nous montrer pauvres, maladroits, trop leader ou pas assez, mais ce que nous souhaitons de tout cœur, c’est aimer de l’amour de Jésus et donner à voir Sa Miséricorde Infinie. Nous ne sommes pas envoyés pour juger nos frères et encore moins les accabler, mais pour leur annoncer un chemin de vie et de salut. « A semer trop peu, on récolte trop peu ; à semer largement, on récolte largement ».
L’Église ce n’est pas seulement le pape, les évêques, les prêtres et les religieux. L’Église c’est surtout vous qui vivez, qui travaillez, qui aimez, qui souffrez. Je dois mon bonheur à chacun de vous qui, par la grâce de Dieu, avez croisé mon chemin. Je précise que le bonheur dont je parle, n’a rien à voir avec le bien-être qui est devenu l’idole de notre monde trop horizontal. Le bonheur c’est d’être aimé par Dieu qui nous dépasse et nous permet de nous dépasser.
Depuis que je suis curé de la cathédrale, je mesure un peu plus, ce que veut dire être pasteur comme homme de communion. Avoir une préférence pour chacun et sentir l’odeur de ses brebis comme l’a répété à souhait le bon Pape François. Les hommes et les femmes, les personnes âgées et les enfants, les pratiquants et les «périphériques » ! Faire de l’Église « une » maison et « une » école de la communion.
J’aime l’Église de la coopération et de la coordination entre prêtres – diacres – laïcs. Ici, à la cathédrale on aime se dire « A tous on peut tout ! » J’aime que chacun puisse trouver sa place dans notre communauté, que chacun puisse donner le meilleur de lui-même dans la joie son baptême. Jamais sans les plus pauvres et les plus faibles, sans ceux qui souffrent et ceux qui sont blessés. Parfois nous leur rendons un bien piètre témoignage, et moi le premier. Je vous demande pardon de ne pas refléter comme je le devrais le visage du Christ.
« Église mon amour tu es ce vase d’argile qui porte le perle de grand prix. Je ne peux te séparer du Christ et je veux te faire aimer »…disait Charles Péguy.
- La mission
Je termine… Osons, mes amis ! Du rêve et de l’audace ! Le monde nous attend.
Dans ce monde fatigué et désorienté, dans ce climat de peurs et de tensions, un retour à l’essentiel se profile après que beaucoup aient goûté à toutes les libertés… Nous le percevons ici avec nos catéchumènes et nos jeunes… L’Église n’est pas un fardeau, elle est un cadeau. L’Église n’est pas froide, dépassée ou déconnectée du monde, elle doit encore révéler son âme au monde.
Catholique, incarnée, proche, une Église qui sait écouter, caresser et souffrir avec la chair de Jésus avec les malades, avec les enfants, avec les joies et les problèmes… tout en restant fidèle à l’enseignement du Christ pour ne pas tomber dans le piège des revendications à la mode.
«Le monde est en feu, disait Sainte Thérèse d’Avila, ce n’est pas le moment de nous occuper d’affaires de peu d’importance ».
Samedi dernier, une jeune de «Profession de foi » m’a demandé si j’étais heureux comme prêtre. J’ai répondu que «je n’ai jamais été aussi heureux qu’aujourd’hui » en ayant toujours été heureux d’être pleinement homme et pleinement prêtre ! Et un autre m’a demandé si j’avais une devise et j’ai répondu : «Être serviteur de la Joie du Christ » !
Joie, gratitude et …. humilité à l’exemple de la Vierge Marie !
Prions les uns pour les autres ! Priez pour que je sache renouveler chaque jour le « OUI » de mon ordination et que je demeure dans la joie de l’Esprit Saint. AMEN.