Homélie 4ème dimanche de Carême (C)
29 mars 2025
Toute la liturgie de ce 4ème dimanche de carême est irradiée par la lumière. Ce dimanche de la joie trouve sa place au milieu de notre cheminement de carême. La pénitence du carême se trouve allégée, mais quel est l’origine de cette joie ?
Vous avez peut-être remarqué que la plupart des lectures nous parlent de nourriture. Ceci pourrait nous faire penser que la joie de ce dimanche est liée à une sorte de mi-carême où l’on peut faire une pause pour reprendre des forces afin d’achever notre marche vers Pâques.
Bien évidemment, il y a une origine bien plus profonde à cette joie. Cette joie vient de la lumière du Christ ressuscité. Depuis que le Christ est ressuscité, le cours de l’Histoire a changé et le cours de nos histoires personnelles aussi peut changer. Par la victoire de la Vie sur la Mort, le Christ veut venir éclairer nos ténèbres.
Glenn, qui est dans son ultime préparation vers le baptême, s’apprête à recevoir cette lumière et cette vie nouvelle. C’est une grâce immense de pouvoir devenir Fils de Dieu. Aujourd’hui, Jésus nous fait comprendre que c’est aussi une responsabilité. Nous connaissons bien la parabole du Fils prodigue que nous avons entendue ce dimanche. Jésus énonce cette parabole en se plaçant du côté du Père. Il nous fait entrer dans la compréhension du cœur miséricordieux de Dieu. Les parents parmi vous comprenne bien cet amour absolu que l’on peut porter à son enfant.
Mais aujourd’hui nous pourrions retourner la parabole pour se placer du côté des fils. Non pas « un homme avait deux fils » mais « deux hommes avaient un père ». Comment considérons-nous notre Père des cieux. Quelle relation avons-nous avec lui et quel genre de fils sommes-nous ?
Nous pouvons être comme ce fils cadet qui demande à vivre sa vie. Mais n’oublions pas les paroles de Jésus « quiconque gardera sa vie la perdra et quiconque la perdra à cause de moi la sauvera ». Nous voyons souvent une grosse différence entre le fils aîné et le fils cadet. En y regardant de plus près, nous constatons qu’ils ne sont pas si différents. Le fils aîné est jaloux, il considère que son père ne lui a pas donné de quoi faire la fête avec ses amis. Le fils cadet, quant à lui, retourne vers son père car il n’a plus rien à manger. Finalement, ils considèrent tous les deux leur père comme celui qui leur doit une aide matérielle. Pourtant ce que veut vivre le père avec ses fils, c’est bien plus que cela, il veut partager une relation d’amour gratuite. Pas simplement un accompagnement matériel mais un lien filial désintéressé.
C’est sous cet angle qu’il faut comprendre le refrain du psaume : « goûtez et voyez comme est bon le Seigneur ». Nous retrouvons ici notre thème transversal de la nourriture. Mais le psalmiste dit bien « goûtez » et non pas « consommez ». Et si c’était cela qu’il restait à convertir dans le cœur de ces deux hommes pour devenir des fils.
Depuis notre baptême, Dieu nous invite à goûter sa présence avec nous et en nous. Non pas simplement le solliciter pour pallier à nos besoins, pour « consommer sa grâce » mais demeurer en sa présence.
Glenn, au jour de ton baptême, une voix va raisonner dans les cieux « celui-ci est mon fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie ». Quel mystère extraordinaire que Dieu, qui est tout puissant, trouve sa joie à être auprès de nous, pauvres hommes imparfaits et fragiles. C’est l’unique attente de Dieu à notre égard : que nous goûtions sa présence en tout temps et en tout lieu.
En ce dimanche de la joie et durant toute cette semaine qui l’accompagne, nous pourrions choisir comme effort de prendre le temps de goûter, de savourer cette présence de Dieu avec nous. Nous pourrions choisir d’avoir des temps plus fréquent de prière à ses côtés ou bien de le rencontrer par un temps de qualité passé avec son conjoint ou ses enfants ou encore de le retrouver au travers de sa création en goûtant la beauté d’un paysage ou d’une musique.
Voilà l’effort que je vous invite à vivre durant cette semaine : goûter la présence de Dieu ; sortir de cette spirale de la consommation et du rendement dans laquelle le monde veut nous enfermer. Et cela demande un véritable effort !
Pour comprendre cette conversion à laquelle le Seigneur nous appelle je vous laisse avec les paroles de Saint Augustin[1] :
Tu étais avec moi
et je n’étais pas avec toi ;
elles me retenaient loin de toi,
ces choses qui pourtant,
si elles n’existaient pas en toi,
n’existeraient pas !
Tu as appelé, tu as crié
et tu as brisé ma surdité ;
tu as brillé, tu as resplendi
et tu as dissipé ma cécité ;
tu as embaumé, j’ai respiré
et haletant j’aspire à toi ;
j’ai goûté, et j’ai faim et j’ai soif ;
tu m’as touché
et je me suis enflammé
pour ta paix.
[1] Saint Augustin, Confessions 10, 27.