Homélie du 9 mars 2025

1^er dimanche de Carême (C)

En ce premier dimanche de Carême, nous sommes invités à pénétrer le désert de notre cœur, à l'image du Christ, afin de contempler la profondeur de nos tentations et la grandeur de la réponse de Dieu. Dans l'Évangile d'aujourd'hui, Jésus fait face à trois tentations qui, loin d'être de simples épreuves, nous révèlent les enjeux de notre vie spirituelle. En ce début de carême, nous nous engageons dans un nouveau combat spirituel. Lorsqu’on mène un combat, il est bon de connaître les tactiques de notre adversaire. Dans l’Évangile d’aujourd’hui, Saint Luc nous dit que le diable a « épuisé toutes les formes de tentations » en essayant de faire tomber Jésus.

Arrêtons-nous ce dimanche sur ces formes de tentations pour mieux comprendre de quelle manière Satan cherche à nous faire tomber nous aussi.

1. La tentation de transformer la pierre en pain

Au niveau spirituel, cette tentation représente le défi de résister à l'appel de la satisfaction immédiate des désirs matériels ou émotionnels. Ce temps du carême nous invite à reconnaître que, malgré la nécessité du corps, notre âme a besoin d'une nourriture plus subtile et durable : la Parole, la prière, la méditation. Ce dépassement de l'urgence des plaisirs terrestres nous guide vers une confiance en la providence divine et vers la quête d'une vie intérieure nourrie par l’écoute de Dieu. C’est notamment par la pratique du jeûne que nous pouvons exercer notre volonté à résister à cette forme de tentation.

2. La tentation des royaumes du monde

Voyant que Jésus ne cède pas à la tentation, le diable va l’emmener « plus haut », c’est-à-dire qu’il va le tenter plus profondément. L'offre des royaumes symbolise l'attrait des pouvoirs et des gloires éphémères. Cette tentation nous interpelle sur l'illusion des honneurs et des richesses terrestres qui, bien souvent, détournent notre cœur du véritable appel divin. Elle nous enseigne que le véritable royaume n'est pas celui de l'ambition ou de la domination, mais celui de l'amour, du service et de l'humilité devant la grandeur du mystère divin. Durant notre carême nous pourrions nous poser la question : « qu’est-ce qui oriente les choix de ma vie ? » Mes choix de carrière, de logement, d’activités, de relations et bien d’autres ! Est-ce que je suis guidé par la volonté d’être reconnu, d’avoir un certain statut, d’une certaine renommée ; ou est-ce que je recherche de quelle manière je peux me mettre au service de l’autre ? Pour nous aider dans cette tentation, l’Église nous propose de vivre l’aumône durant ce temps de carême.

3. La tentation de se jeter du sommet du temple

Voyant qu’il n’obtient pas ce qu’il veut, Satan va emmener Jésus au sommet du Temple, comme pour signifier qu’il va le tenter au plus profond de son âme. Effectivement, il va le tenter sur sa relation avec son Père. Cette épreuve incarne la tentation de mettre Dieu à notre service plutôt que de rechercher à être à son service. Si l’on y réfléchi, cette tentation est très actuelle. Il s’agit de considérer Dieu avec un esprit de consommation : je ne m’adresse à Dieu que quand j’en ai envie et uniquement pour lui demander les grâces que j’ai décidé d’avoir. On se retrouve ainsi à faire de Dieu notre serviteur. Finalement cette tentation vient très facilement dégrader notre relation à Dieu qui ne doit pas être intéressée mais totalement gratuite. Ce carême doit nous rappeler que la foi véritable se fonde sur une confiance silencieuse et intime, qui ne requiert pas d'ultimes preuves mais se nourrit de l'amour constant de Dieu et d'une relation profonde avec lui. Pour entrer plus profondément dans cette relation d’amour gratuit, l’Église nous propose l’ascèse de la prière durant ce carême.

Une invitation à la conversion

N’oublions pas que Jésus part au désert remplis d’Esprit-Saint. Avons-nous fait le plein d’Esprit-Saint au début de ce carême ?

Pour vivre ce carême en vérité, n’hésitons pas à l’entamer par un « plein » d’Esprit-Saint en recevant le sacrement de réconciliation. Il nous permettra d’utiliser efficacement les armes du jeûne, de l’aumône et de la prière pour résister aux tentations du Mauvais.

En ce temps de Carême, nous sommes conviés à reconnaître nos propres faiblesses et à nous tourner vers la grâce divine pour y puiser la force de dire non aux séductions du monde. Jésus, par son exemple, nous montre que la voie de la fidélité passe par le renoncement aux satisfactions immédiates, la confiance inébranlable en Dieu, et le rejet des illusions de grandeur.

Que ce chemin de Carême soit pour chacun de nous l'occasion de se dépouiller des fardeaux superflus, de nourrir notre âme par la prière et l'écoute de la Parole, et de s'engager sur le chemin de la transformation intérieure. Puissions-nous, à l'image du Sauveur, trouver dans le désert de nos vies la source vivifiante d'une foi renouvelée. Amen.