Homélie du 3 novembre - 31ème dimanche ordinaire (B)

Depuis deux jours, nous avons le regard tendu vers le ciel, tendu vers la lumière des bienheureux et des saints qui contemplent la gloire de Dieu, tendu vers l'intercession pour nos frères et sœurs défunts. Et aujourd'hui, le Seigneur vient s'adresser à nous, qui sommes encore pèlerins ici-bas. Il vient nous redire comment emprunter ce chemin qui mène au ciel.

Trouver le chemin qui mène au ciel, c’est la question que pose le scribe à Jésus en demandant quel est le premier des commandements. Dans un autre passage de l'Évangile, on l'a d'une autre manière, quand le jeune homme riche lui dit : « Maître, que dois-je faire pour avoir la vie éternelle ? » Finalement, c'est ça la grande question. Comment faire pour nous aussi participer à cette grande gloire de Dieu que nous avons célébrée il y a deux jours ? Eh bien, le Seigneur, aujourd'hui, vient nous rappeler ce chemin.

Ce chemin, c'est celui de l'amour. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de toute ta force, de toute ton âme, de tout ton esprit. Et le Seigneur, vous l'avez entendu dans la première lecture, vient nous redonner le cadre : l'itinéraire pour suivre ce chemin, c’est de suivre ses commandements.

Quand le Seigneur donne des commandements, ce n'est pas pour nous contraindre, mais c'est comme des parents qui donnent des règles à leurs enfants pour leur dire, si tu suis ces règles-là, tu arriveras à la destination qui est le bonheur. Mais dans l'Ancien Testament, les commandements commençaient à s'accumuler à tel point qu'on en dénombrait 613.

613 préceptes à respecter. Alors, on comprend bien la question du scribe à Jésus, mais Seigneur, quel est le premier, quel est le plus important de tous ces commandements ? Et là, Jésus va reprendre ce qui avait déjà été dit dans l'Ancien Testament : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu. Mais il va mettre au même niveau, « tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Ça, c'est déjà une petite nouveauté, de mettre au même niveau l'amour de Dieu et l'amour du prochain. Le scribe qui a posé la question accueille ce que lui dit Jésus : maître, tu dis vrai. Jésus va être touché de la réponse de ce scribe et va lui dire, tu n'es pas loin du royaume de Dieu. Il ne lui dit pas, tu es, ça y est, tu es arrivé. Il lui dit, tu n'es pas loin. Pourquoi est-ce qu'il lui dit que tu n'es pas loin ? Parce qu'il a la moitié, on pourrait dire, du chemin. Il a la carte, il a l'itinéraire. Il connaît le chemin : l'amour de Dieu et du prochain. Mais il n'est pas encore arrivé. Il s'agit maintenant de mettre en œuvre, de mettre en pratique ces commandements.

Maintenant, vas-y, engage-toi. C'est ça que vient lui dire Jésus aujourd'hui. Quand Jésus fait cette alliance folle de relier l'amour de Dieu et du prochain en un seul commandement, il le fait parce qu'il va nous révéler quelque chose d'extraordinaire.

Il vient nous révéler que par le baptême, nous recevons d'une manière réelle la présence de l'Esprit Saint en nous. Quand nous sommes baptisés, nous devenons le temple de l'Esprit Saint. Alors oui, quand nous aimons notre prochain, nous aimons Dieu puisque Dieu habite en lui.

Il réconcilie, il unit ces deux commandements qui ne sont pas deux choses différentes mais finalement la même chose. Aimer Dieu et son prochain parce que Dieu est dans notre prochain.

Nous qui sommes chrétiens, nous qui sommes baptisés, parfois nous pouvons avoir une image faussée du baptême.

On peut considérer le baptême comme une sorte de ticket gagnant pour le ciel. Ça y est, je suis baptisé, j'ai mon ticket, je le garde bien au chaud. Et puis quand je paraîtrai devant le Seigneur, je lui présenterai mon certificat de baptême et je serai accueilli dans les cieux.

Mais le baptême, c'est tout autre chose. Le baptême, c'est une révolution profonde de notre façon de vivre. Le baptême, c'est une manière nouvelle justement de vivre dès ici-bas sur terre.

Et dès ici-bas, on peut être dans le royaume de Dieu. Pas seulement « pas loin », mais dans le royaume de Dieu. Parce que le baptême nous rend proche de Dieu. Être en contact direct avec Dieu, c'est ça la vie éternelle. La vie éternelle, c'est d'être avec Dieu.

Alors comment ici-bas, encore sur terre, pouvoir être déjà dans le royaume de Dieu, être avec Dieu ?

Il y a plusieurs moyens qui sont sûrs et que le Seigneur nous a donnés : les sacrements. Chaque fois qu'on vit un sacrement, on est sûr qu'on rencontre Dieu ; quand on participe à l'Eucharistie, quand on va recevoir son pardon dans la confession, quand on reçoit le sacrement des malades, le sacrement du mariage, tous les sacrements, on est sûr qu'à ce moment-là, on rencontre Dieu.

Mais on ne peut pas passer sa vie à la messe. On ne peut pas passer sa vie au confessionnal. Ce n'est pas ce que le Seigneur nous demande.

Et pourtant, il nous demande de le rencontrer au quotidien. Alors comment faire ? Les pères de l'Église ont nommé un autre sacrement qui n'est pas un huitième sacrement, rassurez-vous, mais qu'ils appellent le sacrement du frère. Peut-être avez-vous déjà entendu cette expression, ce sacrement du frère.

Il était particulièrement mis en valeur le jour du jeudi saint par le geste du lavement des pieds que Jésus a uni intimement à l'Eucharistie. C'est ce sacrement du frère que nous sommes appelés à vivre au quotidien comme chrétiens. Nous devons être convaincus qu’en nous approchant de notre frère, en servant notre frère, en prenant soin de lui, nous rencontrons Dieu. Nous pouvons réellement le servir, nous pouvons réellement le connaître, l'aimer, mais il se cache. Il se cache dans nos frères, il se cache dans les rencontres, dans le pauvre qui nous tend un regard, c'est Jésus qui se cache. Et bien souvent, c'est nous qui avons du mal à être attentifs parce que nous sommes pris dans notre quotidien, dans nos propres idées. En aimant mon prochain, j’aime Dieu, je le connais d'une manière expérimentale. Je l'ai rencontré, je l'ai servi, je l'ai côtoyé. C'est le sacrement du frère.

Nous ne sommes pas loin du royaume. Nous avons tous entendu aujourd'hui les commandements du Seigneur. Aimer Dieu est notre prochain.

Eh bien comment allons-nous les mettre en œuvre ? Comment allons-nous au quotidien vivre des sacrements, vivre du sacrement du frère, connaître Jésus, l'aimer, le servir, le reconnaître ? Souvent Jésus est caché, mais il est bien présent. Il est discret, mais il n'est pas absent. Alors c'est à nous d'être attentifs, de veiller.

Seigneur, comment vais-je te rencontrer aujourd'hui ? Comment vais-je être attentif à te découvrir et en te découvrant à t'aimer, à te servir ? C'est la seule question qui devrait nous préoccuper. Seigneur, où es-tu aujourd'hui ?

Demandons au Seigneur d'accueillir ses commandements « Aime le Seigneur ton Dieu, aime ton prochain comme toi-même » et de pouvoir les mettre en pratique dans chacune de nos vies. Amen.

Père Thibault de Bruyn

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