Homélie du 2 avril 2023

Homélie prononcée par Mgr Centène au cours de la messe de 11 heures

Par la célébration du dimanche des Rameaux, nous entrons dans la Semaine Sainte, au cours de laquelle nous nous rassemblerons à plusieurs reprises pour nous rappeler la Passion de Jésus, pour entrer dans le grand mystère du Christ qui oppose l'amour à la violence ; qui accepte de passer par la mort pour ressusciter au matin de Pâques.

Le mystère pascal qui commence par la Passion de Jésus, est le thème principal de la prédication chrétienne.

La Croix reste encore aujourd'hui le symbole de la souffrance, mais surtout de l'immense amour.

Chacun des quatre évangélistes, a une façon particulière de raconter le récit de la passion :  Saint Mathieu que nous lisons cette année, comme les trois autres évangélistes, a ses particularités. En effet, il s'adresse à des juifs devenus chrétiens. Et donc, vous l'avez remarqué, il a enrichi son récit de nombreuses citations de l'Ancien Testament, afin de bien faire comprendre que le Christ accomplit ce que les prophètes avaient annoncé.

En racontant le déroulement du procès, il affirme que la décision de condamner Jésus à mort a été prise avant qu'il ne soit traîné devant le tribunal. Le procès devient dès lors une parodie de justice. Mathieu insiste sur la responsabilité des autorités juives, et il est porté à diminuer la responsabilité de Pilate et des Romains. Il veut établir clairement que Jésus n'a pas été condamné pour des raisons politiques, mais bien pour des raisons religieuses.

• Pilate essaie de relâcher Jésus en proposant de l'échanger contre un autre prisonnier, Barabbas.
• La femme de Pilate vient plaider auprès de son mari, pour qu'il ne se mêle pas de cette mort.
• Enfin, Pilate se lave les mains pour signifier qu'il n'est pas responsable du crime.

Jésus n'a pas cherché la croix. Ce sont les chefs religieux et la foule qui l'ont condamné à mourir pour se débarrasser de lui. La croix n'a pas été voulue par le Père. C'était le châtiment imposé à Jésus par l'élite religieuse pour s'être opposé à sa façon de faire, et à sa façon de comprendre l'alliance avec Dieu.

Jésus aurait pu éviter de se rendre à Jérusalem comme ses disciples le lui avaient recommandé. Mais au lieu d'éviter la ville sainte, il y entre de manière ostensible, solennelle.

Il décide de se confronter au pouvoir qui a juré sa perte. En agissant ainsi, il fait face à l'oppression et démasque l'injustice de notre monde. L'amour souligné dans le texte de Matthieu est un amour trahi, un amour blessé, un amour bafoué, un amour méprisé. Jésus a été renié par Pierre, trahi par Judas, abandonné par ses disciples, condamné par les chefs de son peuple. Les soldats romains l'ont torturé et la foule l'a rejeté en lui préférant un malfaiteur. Matthieu interpelle les chrétiens de son temps comme ceux d'aujourd'hui. Et semble nous dire que même si nous partageons la table de Jésus nous sommes capables de le trahir.

L'eucharistie, comme la dernière Cène est le repas des pécheurs et des traîtres.

Pierre, Judas et tous les autres apôtres partagent le pain avec Jésus avant de le renier, de le vendre ou de l'abandonner.

Frères et sœurs hier comme aujourd'hui, la communauté ecclésiale est donc composée d'hommes et de femmes faibles, pécheurs, parfois infidèles.

Il en est ainsi depuis le début. Lorsque le Christ innocent est condamné à la torture et à la mort. La mort la plus terrible que les êtres humains aient inventée, personne n'a eu le courage de le défendre. Le Christ a souffert dans une solitude totale. Abandonné de tous.

A travers ses souffrances, il se rapprochait des millions de personnes qui subissent l'injustice et le rejet. Sur la croix, le Christ prie le Psaume 21 «  Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné? » Il n'a jamais cessé d'appeler au secours, et il n'a pas douté un seul instant que Dieu l'écoutait.

La conclusion de la passion selon saint Matthieu se trouve dans la proclamation de l'officier romain : « Vraiment, cet homme était le Fils de Dieu. »

Frères et sœurs, le peuple chrétien est le peuple de la mémoire. À chaque célébration eucharistique, nous nous rappelons les paroles du Christ : « Faites ceci en mémoire de moi. »

 La lecture de la Passion et de la résurrection du Christ est le cœur vivant de cette mémoire.

Demandons aujourd'hui au Seigneur d'avoir le courage de ces quelques femme qui ont accompagné Jésus jusqu'au bout.

• Du centurion romain qui a reconnu qu'il était vraiment le Fils de Dieu.
• Du voleur qu'il a défendu et lui a demandé d'être avec lui dans son royaume.
• De Joseph d'Arimathie qui est allé réclamer son corps pour l'ensevelir dignement.

La mémoire de la Croix du Christ nous rappelle toutes les croix qui existent dans notre monde. La souffrance de celles et ceux qui sont victimes de la guerre, de la violence, de l'injustice, de l'indifférence, de la trahison. Le récit de la passion devrait nous ouvrir les yeux, le cœur, les mains. Car les critères pour entrer dans le Royaume de Dieu sont toujours ceux de Matthieu au chapitre 25 de son Évangile :

« J’avais faim et vous m'avez donné à manger. J'avais soif et vous m'avez donné à boire. J'étais malade, prisonnier, et vous m'avez visité. »

Frères et sœurs pendant cette Semaine sainte en méditant sur la mort du Christ, ouvrons nos yeux, nos cœurs, nos mains sur les souffrances de notre monde !

Le mystère de Pâques, n'est pas un souvenir du passé. C'est un appel à partager notre espérance et à répondre aux besoins de notre monde d'aujourd'hui.

Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit. Amen.