Homélie du 6 novembre 2022

Homélie 32^ème dimanche du Temps Ordinaire (C)

La question que posent les Sadducéens à Jésus peut paraître un peu artificielle : « à la résurrection, cette femme-là, duquel d’entre eux sera-t-elle l’épouse, puisque les sept l’ont eue pour épouse ? ». On sent bien qu’ils essayent de prendre Jésus en défaut pour lui montrer que la foi en la résurrection est incompatible avec la Loi de Moïse. Mais la réponse de Jésus ne laisse aucun doute : la certitude de la résurrection est au cœur de notre foi.

Pourtant ce mystère central de notre foi n’est pas le plus facile à expliquer. Avons-nous de la facilité à témoigner de notre foi en la résurrection autour de nous ? Comment pouvons-nous aujourd’hui faire rayonner cette bonne nouvelle de la résurrection de la chair ?

Souvent lorsque nous parlons de notre foi avec des non-croyants, la question de la vie après la mort vient très vite dans la discussion. Et bien souvent, si nous pouvons être à l’aise pour dire que nous croyons que l’âme ne meurt pas et qu’elle se retrouve dans la béatitude auprès de Dieu, nous sommes souvent beaucoup plus pudiques quand il s’agit de témoigner de notre foi en la résurrection des corps !

Mais attention, il n’y a pas besoin d’être chrétien pour croire en l’immortalité de l’âme. Déjà dans la Grèce antique, on affirmait que l’âme était incorruptible et qu’une fois délivrée de son lien avec le corps par la mort, elle entrait dans l’immortalité divine. Ce qui est donc proprement chrétien, c’est la résurrection de la chair. Et au temps de Jésus certains remettent en doute cette résurrection, c’est le cas des Sadducéens. A leur décharge, il faut être conscient que la révélation de cette résurrection a pris des siècles et que le passage que nous avons entendu en 1^ère lecture est l’une des premières affirmations bibliques de la foi en la résurrection et qu’elle ne date que de 165 avant Jésus Christ.

C’est donc cette foi en la résurrection qui est au cœur de la liturgie de ce dimanche, c’est aussi ce qui est au cœur de la prédication des apôtres et ce qui devrait être au cœur de notre témoignage, comme Saint Paul le dit si clairement : « S’il n’y a pas de résurrection des morts, le Christ non plus n’est pas ressuscité. Et si le Christ n’est pas ressuscité, notre proclamation est sans contenu, votre foi aussi est sans contenu. » 1Co 15,13-14.

Mais alors comment témoigner aujourd’hui de notre foi en la résurrection ?

Peut-être qu’avant d’en témoigner, il faut prendre le temps de méditer ce mystère de la résurrection. Accueillir déjà pour soi-même cette bonne nouvelle que Dieu veut nous sauver tout entier, corps et âme. Tout ce qui nous constitue, Dieu l’aime et veut le sauver. Nous percevons alors la profondeur de ce mystère d’amour qu’il s’agit de transmettre. Alors comment faire ?

• Nous pouvons le faire à la manière de Jésus, une manière explicite qui s’appuie sur la Parole de Dieu. Mais nous n’avons pas forcément tous le charisme de pouvoir exposer notre foi simplement, avec fermeté et bienveillance. Nous avons peut-être du mal à trouver les bons mots. Dans ce cas, c’est une invitation à nous former pour être capable de témoigner le plus justement possible de notre foi.

• Nous pouvons aussi témoigner par notre façon d’être. La façon dont vit un chrétien doit montrer sa foi en la résurrection. Si nous croyons que notre corps va ressusciter alors nous devons en prendre soin. Pas en prendre soin pour le « paraitre » mais en prendre soin car il est le temple de l’Esprit et qu’il est destiné à être transfiguré. Cela peut nous poser des questions sur les gestes que nous posons et l’infini respect que réclame le corps de l’autre. Le corps du plus faible, le corps malade, le corps souffrant. Ce corps, si diminué soit-il, reste beau car il témoigne du mystère de cette vie que Dieu nous donne et qu’il veut nous faire partager en plénitude.

• Certains aussi parmi les chrétiens sont appelés à témoigner de la foi en la résurrection par la vie consacrée. Ce témoignage de tant de religieux et religieuses qui ont montré à la face du monde qu’ils voulaient dès ici-bas vivre en « enfants de la résurrection » qui « ne peuvent plus mourir ». Ce sont des témoignages sans paroles et pourtant si percutants.

• Et enfin nous pouvons tous témoigner de notre foi en la résurrection même après notre mort. C’est le sens de la sépulture chrétienne. A notre époque où l’on ne cesse d’inventer de nouvelles manières de réaliser une sépulture, inhumer son corps tourné vers l’est (le soleil levant) en signe explicite d’attente de la résurrection est un témoignage pour nos contemporains.

Témoigner de la résurrection, c’est affirmer que tout ce que Dieu a créé, il veut le sauver. Il veut nous sauver corps et âme et pour opérer ce salut il nous donne son propre corps ressuscité en nourriture. Demandons spécialement au cours de cette eucharistie, la grâce d’une foi plus grande en la résurrection pour pouvoir répandre cette bonne nouvelle autour de nous. Amen.

P. Thibault De Bruyn