Etes-vous des gens bien ? Sommes-nous des gens bien ?
Pensez-vous être quelqu’un de bien élevé ?
Avez-vous quelque fierté à être qui vous êtes ?
- Saint Paul pense qu’il est quelqu’un de bien, qu’il a mené le bon combat et qu’il va recevoir bientôt la couronne de justice.
- Le Pharisien de la parabole pense lui aussi qu’il est quelqu’un de bien.
Tous les deux se pensent justes devant Dieu. A l’inverse, le publicain se pense misérable.
Il s’humilie devant Dieu, mais pas pour être rabaissé, dévalorisé, car Dieu n’humilie personne.
C’est ce que tente de nous faire comprendre la première lecture : la souffrance n’est pas une humiliation, un mépris, une punition que Dieu impose.
Essayons de comprendre !
Deux hommes montent au Temple : un pharisien et un publicain. Notre premier tort serait d’imaginer que nous sommes l’un ou l’autre. Nous sommes les deux : tantôt l’un et tantôt l’autre.
A l’époque de Jésus, les pharisiens représentent un des nombreux courants du judaïsme en crise, c’est le courant montant, qui deviendra dominant après la mort de Jésus. Les pharisiens, c’est un peu le nouvel establishment politique et religieux, d’où sortiront après la destruction du Temple les rabbins. Pharisien veut dire «séparé » dans le sens qui se considère mis-à-part des autres, plus pieux, plus respectueux de la loi, nouveau juif comme on est nouveau riche, sûr de soi et peut-être arrogant. «Je ne suis pas comme les autres hommes, voleur, injuste, adultère. Moi, je jeûne et je fais l’aumône ». Voilà un pharisien.
Les publicains, eux, ont choisi une toute autre orientation politique. Ils collaborent avec l’occupant romain. Ils collectent pour lui les impôts. Ils tiennent pour lui des tâches administratives. Ils sont mal aimés car vus comme des « collabos ». Le publicain que la parabole nous présente n’ose même pas lever les yeux vers Dieu… «Je suis pécheur, Seigneur, aide-moi ».
Et Jésus renverse la logique. Celui qui se reconnaît injuste est plus juste que celui qui se croit juste. L’un est clairvoyant sur lui-même et l’autre est aveugle !
On a ainsi, au fil des lectures de ce dimanche, quatre situations :
- La première est de se croire coupable de tous les malheurs qui nous arrivent. On se dit : « C’est de ma faute, c’est Dieu qui me punit, pour ce que j’ai fait ». Et alors on reste accablé, désespéré et on n’avance plus.
- La deuxième est celle du publicain de l’évangile, qui d’emblée, se reconnaît pécheur. Il est lucide sur lui-même, sur sa médiocrité, et il laisse Dieu faire la lumière dans sa vie. Il sait qu’il a besoin de l’aide de Dieu.
- La troisième est celle du pharisien qui regarde autour de lui pour se comparer aux autres avec une pointe d’orgueil en se disant : « Heureusement que je ne suis pas comme eux ! » Il ne prie pas, il est dans sa propre satisfaction. Il se louange lui-même et ceux qu’il méprise renforcent son sentiment de perfection. Il n’a rien à demander à Dieu. Sa fierté vient de lui-même.
Nous le savons.
- Plus on est content de soi-même, bien-pensant et important, plus on a tendance à l’autosatisfaction, parfois au prix d’un bel aveuglement sur ses défauts.
- Plus on prend de l’importance socialement, professionnellement, plus on fait l’impasse sur la bienveillance de Dieu pour tous. On s’arrange avec notre conscience pour que nos fautes restent bien sous le tapis et que Dieu aille plutôt voir les péchés des autres.
- Et la quatrième situation est celle de l’apôtre Paul, qui a mené le bon combat, et qui a raison d’espérer la couronne de justice alors qu’il va bientôt mourir.
Paul ne se donne pas sa propre gloire, il l’attend de Dieu. Toute sa vie, il a mené le combat contre lui-même, (l’écharde dans sa chair), et il a œuvré pour annoncer l’évangile auprès des nations « périphériques ».
En ce jour où nous clôturons la Semaine missionnaire mondiale, la figure de Paul apôtre des missions nous interpelle. Il a mené le bon combat, non pas pour accroître sa puissance, ni sa gloire, mais pour faire rayonner le message d’amour du Christ. Notre mission aujourd’hui est toujours comme celle de Paul, et le pape François nous le rappelle dans son encyclique « La joie de l’Evangile ».
Nos actes, nos efforts, nos prières sont vaines si elles reflètent nos autosatisfactions, nos esprits de clocher, nos rivalités et nos volontés de puissance.
Alors faut-il toujours se rabaisser et se minimiser devant Dieu ?
Non, car il y a une élévation de soi qui n’est pas de l’orgueil mais de la sainteté. C’est l’ambition du devoir qui s’obtient en s’abaissant. Honnêteté, humilité, et vérité qui rendent libre !
Sont justes ceux qui savent «s’ajuster » de manière harmonieuse à Dieu et à leurs frères en s’en remettant à Dieu, l’unique et juste juge.
Sont justes ceux qui aiment et non ceux qui condamnent !
Être juste ne consiste pas seulement à être sans reproche, sans péché, parfait en tout point, mais à se tenir juste à sa place, avec ses limites, ses défauts, ses péchés.
A la lumière de cela, nous pourrons être des «gens biens et des personnes bien élevées et être fiers d’être enfants de Dieu ». AMEN.
P. Patrice Marivin